jeudi 6 octobre 2011

Heureux qui comme les Kids



Il existe des groupes dont on suit la trajectoire avec un intérêt certain.
Des groupes dont on pense parfois pouvoir prédire l'avenir avec certitude et c'est dans l'espoir de voir nos prédictions se réaliser que l'on scrute pas à pas leurs carrières. C'est dans cet état d'esprit que j'observe avec attention la progression de The Cool Kids.

Depuis 2008, le cheminement du duo formé par Sir Michael Rock et Chuck Inglish est plus que singulier. En 2008, portés par le succès de leur mixtape The Bake Sale EP, les Kids deviennent le nouveau phénomène hype sans que l'on comprenne vraiment pourquoi.

A cet instant un petit flashback est nécessaire.
Je parle d'une époque pourtant pas si lointaine où Facebook était l'apanage d'un nombre restreint de geek et commençait juste à percer les milieux étudiants français. Je parle d'une époque où le rap mainstream était plus que moribond et peinait réellement à se renouveller, même aux yeux des auditeurs les moins avertis. C'était avant l'explosion d'un certain Lil Wayne et d'un type de son bien déterminé ( Le grand Minaj de Printemps).

C'est dans ce contexte que le nom des Kids va frapper le grand public. Une démarche sonore résolument passéiste (Eric B & Rakim, les Beasties comme principales inspirations), des tenues fluos kids fashionita-swagg et l'attrait de la nouveauté ont suffit pour que le groupe s'impose comme la nouvelle coqueluche Hip Hop outre Atlantique. Voici ce qu'en disait HipHopdx à l'époque par exemple


L'effet boule de neige ne se fait pas attendre et les Kids gagnent une aura internationale.
Pour l'anecdote, j'ai souvenir de les avoir vu en première partie d'un concert où seulement la moitié de la salle connaissait les Kids et au sein de cette moitié, seulement 1/4 avaient réellement entendu un titre dudit groupe. Pas surprenant quand on sait qu'ils n'avaient alors aucun album à leur actif.

On attendait donc la suite avec impatience. Mais rien ne vint...
Il y eut bien ces sorties de mixtapes annuelles entre 2008 et 2010 mais point d'album à l'horizon. La hype retomba, les Kids repassèrent au second plan.
Cette période de vache maigre s'explique en grande partie par des embrouilles de labels mais aussi par une envie de progresser du côté des deux bonhommes.
Résultat, When Fish Rides Bycicles ne voit le jour qu'en 2011, soit 3 ans après l'émergence du groupe. D'aucun diront que cette trop longue attente les condamne d'entrée de jeu.

Autant casser le suspense après une si longue introduction, When Fish Ride Bycicles (WFRB) est à mes yeux le meilleur album de sa catégorie qu'il m'ait été donné d'écouter cette année.
La plupart des gens qui suivent The Cool Kids l'auront constaté, il y a une indéniable sensation de progression dans le son des deux larrons.
La formule a été longuement policé pour arriver à cet équilibre entre son passéiste et sonorité mainstream actuel. Cette évolution est flagrante quand on compare 88', le morceau emblématique des Kids période 2008 et Bundle Up, le premier single de WFRB






On a le sentiment d'une production moins brute. Les arrengements sont effectivement plus subtils et les mélodies gagnent en variation tout au long de l'album comme sur ce Gas Station avec le toujours impeccable Bun B des UGK.
Si l'album a gagné en profondeur au niveau de la production, il n'en perd pas sa principale force : Les Beats.
En bons amateurs de la période pré Golden Age, les Kids ont été marqué à vie par les beats bien "gras". Kick, Snare et autres grosses caisses marquent l'album de leurs empreintes et lui donnent un entrain certain.
Personnellement, j'ai un gros faible pour ce Rush Hour Traffic et ces variations au niveau du beat qui viennent se fracasser dans l'oreille de l'auditeur par vagues succesives. Délectable.


Si la production est le point fort des Kids, le niveau du emceing reste leur grande faiblesse. Ne cherchez pas une analyse de la crise ou ne serait-ce qu'une esquisse de contestation dans les lyrics. Les thèmes abordés sont clairement puérils et destinés à provoquer l'amusement comme le montre les lyrics de Bundle Up.

Who told you that you can sit with the kids
Computer wiz niggas still can't figure it out thoug
Got indo got out door, with cleaner clothes, (?)
Nissan Patrol with the Bose stereo
I dug hoes trying to grow my seeds
I got plug like the back of the screen man!
You got designs on the back of your jeans
They steam and I’m cold as a lean cuisine
Come and fresh out the freezer, I’m clean with the Caesar
The only third grader in the school with a beeper
Clipped to them seams, front pocket of them Wranglers
My teacher took it from me, its funny how she snatched it
Sleepers can’t sleep if it’s money in the mattress
A lot of niggas still running from their taxes and bills
We will recognize each other, man! Damn!
Damnn, Goin' Ham, Got it Hotter than the Mother Land


Cette ambition d'entertainment est louable quand elle est pleinement assumée. C'est le cas ici mais on sent une vrai différence de niveau lorsque les Kids font équipe avec des pointures comme Ghostface Killah ou Bun B. Mais cela n'a finalement que peu d'importance. Cet album remplit pleinement son objectif d'amusement tout en apportant un son relativement construit. D'où ma déception de ne pas le voir figurer dans les charts et toucher un plus large public.
La hype est passée pour les Kids et ils semblent devoir rejoindre la catégorie un peu étrange des groupes mainstream sous côtés. Finalement ce n'est peut être pas un mal.

Ann-Sé