jeudi 6 mai 2010

Pessimiste en Exile


Je suis un éternel pessimiste. Mes collègues bordeliens ne manquent jamais une occasion de me le rappeler. Lorsque j’ai écris que l’année 2009 était sûrement une de mes pires années en terme d’écoute Hip hop, ils me sont tombés dessus sans tarder. Les charognards !

C’est alors que le formidable polémiste aux éditos aussi long qu’intéressant me lança généreusement une liste d’album que j’aurai manqué et me renvoya à mes chers études. Dans la dite liste, il insiste sur un album et un artiste dont le nom m’était foutrement inconnu : Fashawn (et vu sa tête, ça allait pas m'aider hein..)

En bon élève que je suis, je me suis donc mis à approfondir la chose. L’album dont il était question s’appelle “Boy Meets The World” et est effectivement sorti en 2009. En ce qui concerne l’artiste ,après l’avoir longtemps confondu avec Nashawn (Bravehearts RIP !), je trouve quelques infos intéressantes: FASHAWN est un jeune rappeur issue de la scène West Coast indie mais plus important, il fait parti de l’entourage d’EXILE, le génial producteur du groupe EMANON. Sont également présents sur la tracklist, Blu, Evidence et Aloe Blacc. Rien que ça.
Ce Boy Meets World s’avère suffisamment hot pour que je choppe ce disque rapidement.




Après plusieurs écoutes, je peux donc m’empresser de faire mon rapport à mon contradicteur. Cet album loin d’influer sur mon opinion confirme ma vision de l’année 2009. (Eh PAF dans vos dents !)
Bien sûr, cet album est bon mais il n’en restera aucun souvenir impérissable !

Autant le dire tout de suite, cet album doit beaucoup (pour ne pas dire presque tout) au talent d’Exile qui est, à mon sens, un des meilleurs producteurs dans son genre et qui produit ici quasiment l’intégralité de l’album. Mais nous y reviendrons plus tard. Parlons tout d’abord du MC.

Fashawn est un jeune rappeur et cela se voit. Plein d’énergie, une voix rafraichissante et des textes à revendre. Ce n’est néanmoins pas suffisant à un tel niveau pour laisser une trace durable chez l’auditeur. Quand on a pour partenaire un producteur du niveau d’Exile, on se doit d’être à la hauteur et ce n’est pas encore le cas de Fashawn qui est encore un peu juste techniquement. Sa monotonie dans le flow est son principal défaut. Sur ce point, il souffre de la comparaison avec Blu qui a lui aussi sorti il y a quelques années un album commun avec Exile (l’estimé Below The Heavens)

Enfin, Fashawn ne se distingue pas par des qualités lyricales exceptionnelles. Son propos ne sort pas des sentiers battus par ces prédécesseurs, même si je reconnais qu’il s’en sort parfois très bien face à des invités qui auraient pu lui voler la vedette (je pense ici à Evidence qui m’a laissé très froid sur son complet).

Ce qui emmène cet album à un autre niveau, c’est le talent d’Aleksander Manfredi aka Exile Je suis Exile depuis l’époque d’Emanon et je n’ai jamais été déçu. Radio fut d’ailleurs un des rares albums à trouver grâce à mes yeux en 2009. Si j’aime Exile, c’est parce qu’il fait partie de cette catégorie de producteur soulfull qui parvienne à le morceau samplé. Ecouter un album produit par Exile, c’est rentrer dans une bibliothèque sonore et notre culture musicale en sort toujours grandie.

Pour cet album par exemple, les samples sont d’origine diverses. Des plus connus au plus obscures. NWA, Talib Kweli, Nina Simone, Billy Paul ou Joanna Newsom. Il y a à boire et à manger pour tout le monde…

C’est là, à mon sens qu’Exile fait partie des grand. Il est l’égal d’un Kanye West à ces débuts (quand il donnait dans le soulfull). Ces types ont le talent de dénicher la boucle qu’il faut et de la mettre en valeur ce qui contrairement à ce qu’on peut penser n’est pas donné à tout le monde. C’est cette application qui donne à l’album toute sa chaleur et toute sa force. Démonstration avec la piste intitulée When she Calls .

La boucle est tirée d’un album de Joanna Newsom ( YST) , une harpiste célèbre à San Francisco (merci Wiki !). La façon dont Exile a intercalé la boucle extraite de l’album de Newsom et sa propre interprétation de la boucle de Newsom qu’il a rejouée au clavier est juste remarquable. On a l’impression d’un changement dans la continuité (un peu capillotracté n'est ce pas ?) qui fait qu’on ne peut s’ennuyer en écoutant ce morceau (chose qui arrive souvent en écoutant des albums soulfull surfaits).

Joanna Newsom- Cosmia

Fashawn- When She Calls

Extraordinaire également, la capacité d'Exile de presser une chanson comme une orange et d’en tirer tout autre chose. Je pense ici au travail réalisé sur Samsonite Man ou la basse, la boucle de piano et la voix sont samplés à des endroits différents d'un même morceau puis remodelés pour en faire quelque chose d’absolument neuf. Le sample choisi par Exile est un sample de Billy Paul extrait de l'album Feeling good at The Cadillac Club datée de 1968/1973. Les versions divergent mais 1968 correspondrait à l'album et 1973 à un live enregistré. Le morceau en question est magnifique. Il m'était absolument inconnu par ailleurs. Mais c'est bien connu Billy Paul est un trésor inépuisable !

Billy Paul- Don't think Twice, it's all right


Fashawn- “Samsonite Man” featuring Blu

On pourrait multiplier les exemples tout au long de l’album. Cet album, très bien ficelé musicalement parlant manque pourtant de ce grain de folie que pouvait avoir Radio. Il y manque le concept, l’originalité. Ici Exile donne dans l’exercice de style comme a pu le faire Erykah Badu dans New Amerykah Part II : The return of the Anhk. Ajouter à cela un rappeur plein de promesse mais encore trop tendre et vous obtenez un album agréable à écouter mais qui je le crains disparaitra vite des rayons de ma mémoire musicale. Belle découverte néanmoins que ce Boy Meets World pour chiller cet été.

Zayyad

PS : J'en ai pas parler encore mais vivement le retour d' Aloe Blacc qui met vraiment en appétit sur cette album !

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